Le gouvernement guatémaltèque des années 80 a interdit qu’on lise publiquement ou chante le magnificat de Marie (Lu 1.47‑55) car il craignait que les textes n’entraînent la révolte. C’est l’hymne poétique que Marie a chanté après que l’ange lui eut annoncé qu’elle enfanterait le Fils de Dieu. Il est légitime de se demander comment un chant si doux à propos d’un petit bébé pourrait représenter une menace au pouvoir d’un régime politique. En général, on entend ce texte chanté au moyen d’arrangements vocaux par les chorales du temps des fêtes, et le tout semble très paisible. Nous avons besoin de l’entendre à nouveau.

Au moment où Marie chante cette chanson, Hérode est assis sur le trône. Cet ignoble dirigeant a assassiné ses propres enfants afin de conserver son pouvoir, et il a taxé les indigents et les pauvres afin de construire des édifices majestueux. Peu de temps après avoir appris qu’un Roi rival était né, il avait fait mettre à mort tous les bébés mâles de chaque famille israélite, « à Bethléhem et dans tout son territoire » (Mt 2.16) dans l’intention d’éliminer ce Roi. Comme si cela ne suffisait pas, au-dessus d’Hérode siégeait un empereur romain qui régnait d’une main de fer.

Imaginez-vous être un Israélite sous le règne d’Hérode le despote et vous entendrez Marie chanter à propos d’un envoyé de Dieu qui a le « bras fort » et qui « a dispersé ceux qui avaient dans le coeur des pensées orgueilleuses » (Lu 1.51). Elle vous captive. Puis, elle prononce de magnifiques paroles décrivant celui qui « a renversé les puissants de leurs trônes, et [qui] a élevé les humbles » (v. 52). Grâce à ses mots, l’espoir ressurgit. Les promesses de Dieu, données par les prophètes il y a fort longtemps, ne sont pas oubliées. Il établira sa justice. Pas étonnant qu’Hérode ait fait tuer tous les bébés mâles.

Durant le mouvement des droits civiques des États-Unis, un vieux chant gospel intitulé « We shall overcome » (Nous triompherons) est devenu l’hymne d’espoir d’une génération opprimée. Le chant de Marie offre un hymne pour chaque génération opprimée : Dieu triomphera.